Rien ne peut être comparé à l'Eglise de Dieu

En résumé, il faut reconnaître que sur les branches maîtresses de la prière et de la charité, il y a des fruits immenses, sans pareils, surabondants, et que sur la branche fondatrice de la vérité, l’Église a aussi produit des fruits exceptionnels de discernement dans tous les siècles, tout au long de l’histoire de l’humanité depuis 2000 ans (et on serait bien avisé de continuer à en profiter !).

Conclusion de tout cela : au lieu d’hurler avec les loups pour dénigrer l’Église, au lieu de s’arrêter sur ce qui n’y est pas bien, au lieu de s’enfoncer dans la partie noire, qui peut effectivement exister parfois, comme elle existait déjà du temps du Christ, – qui a été trahi par Judas et renié par beaucoup –, au lieu de rester à tâtonner dans l’ombre des obstacles qui empêchent de voir directement d’où vient le salut, il faut prendre du recul, chercher la lumière de Dieu et s’y laisser envelopper et entraîner – pour plein de raisons.

Il faut aussi arrêter de juger et de critiquer l’Eglise et de la regarder avec un œil mauvais. Ce n’est pas comme cela que les saints nous invitent à la rendre plus sainte. On connaît la réponse que fit un jour Mère Teresa à un journaliste qui l’interrogeait : « Quand vous voyez tout ce qui se passe dans l’Église et dans le monde, que faudrait-il changer ? — Mais vous et moi, cher Monsieur ! Ce qu’il faut changer c’est vous et moi ! » Bernanos, de son côté, professait que l’Église n’avait pas besoin de réformateurs mais de saints. Et il précisait : « On ne réforme l’Église qu’en souffrant pour Elle, on ne réforme l’Église visible qu’en soufrant pour l’Église invisible. On ne réforme les vices de l’Église qu’en prodiguant l’exemple de ses vertus les plus héroïques. »

Rien ne peut être comparé à l’Église de Dieu

L’Eglise, qui fait énormément de choses admirables, passe aussi son temps à demander pardon pour ses faiblesses et pour ses manquements, afin d’être une digne épouse du Christ[1]. Elle demande pardon à la messe chaque jour, et elle l’a fait spécialement en l’an 2000 aussi, pour tous les péchés commis (car certains de ses représentants ont effectivement fauté, parfois gravement). La seule entité qui demande pardon au monde est aussi l’entité la plus sainte du monde. C’est précisément pourquoi elle demande pardon. Saint François d’Assise est celui qui pleurait le plus ses péchés, comme tant de saints ; même s’ils en avaient certainement bien moins besoin que beaucoup d’entre nous…

L’Église est l’œuvre la plus sainte du monde et les saints sont les lumières du monde

On ne peut pas aimer le Christ sans aimer l’Église, elle qui est le trésor de Dieu, « la demeure de Dieu parmi les hommes » (Ap 21,3).

En l’an 1431, sainte Jeanne d’Arc, qui vient avec l’aide de Dieu de restaurer miraculeusement le roi Charles VII sur le trône de France, est capturée par ses ennemis. Elle est mise en accusation devant un tribunal ecclésiastique. Soixante-dix chefs d’accusations ont été retenus contre elle ! D’un côté, les évêques, représentants de l’autorité de l’Église ; de l’autre, l’innocente jeune fille. Et que fait Jeanne ? Se révolte-t-elle contre l’abus de pouvoir ? Désavoue-t-elle cette institution qui va la conduire au bûcher ? Les juges l’interrogent sur sa fidélité à l’Église, elle qui ne cesse de se réclamer du Christ : ne prétend-elle pas dépendre directement du Christ, et se passer de l’Église ? Mais Jeanne, du fond du cœur, répond[2] : « De notre Seigneur et de l’Église, c’est tout un, il ne faut point en faire difficulté. »

C’est le mystère de l’Église qui se dévoile dans cette scène, où l’on peut voir en même temps le poids du péché, qui la défigure, et la sainteté de Jeanne, qui en révèle le vrai visage : calomniée, condamnée par les ministres de cette même Église, Jeanne, la sainte, reste indéfectiblement fidèle à celle que le Christ a choisie, établie et aimée, et avec qui il ne fait qu’un seul Corps.

La sainteté est toujours méconnue, calomniée, salie et diffamée par le monde. La technologie transforme ces attaques en épreuves quotidiennes pour l’Église. Mais ne soyons pas dupes.

Les saints sont les vraies lumières du monde, et c’est de l’Église qu’ils viennent.

C’est à partir de ce trésor que nous pourrons nous aussi marcher vers Dieu en vérité.

« Hors de l’Église, point de salut »

« Hors de l’Église, point de salut », dit l’ancien adage chrétien[3]. Dès ici-bas, si ceux qui ne connaissent pas le Christ peuvent être sauvés, c’est par l’Église : par la prière de l’Église, parce qu’elle est la prière du Christ lui-même, l’unique Médiateur entre Dieu et les hommes. Si ceux qui ne connaissent pas le Christ peuvent être sauvés, c’est aussi dans l’Église : même s’ils l’ignorent, ils sont présents dans le Cœur plein de miséricorde du Christ, ce Cœur qui contient tout l’univers et qui bat dans la prière de l’Église. Et au Ciel, tous ceux qui seront sauvés se reconnaîtront pour ce qu’ils sont : des pécheurs lavés dans le sang du Christ, rassemblés en un seul Corps dans le Christ, et par lui Fils du Père, vivant de la vie même de Dieu, et citoyens de la Jérusalem céleste, l’Église triomphante et glorieuse.

Voilà pourquoi nous aimons l’Église : parce qu’au-delà des péchés et des insuffisances, au-delà de la pesanteur historique, l’Église n’est rien d’autre que le projet de Dieu pour l’humanité, l’humanité sauvée, renouvelée, aimée, glorifiée, divinisée par Dieu, dans le Christ. C’est cette Église dont l’apôtre Jean a eu la vision (Ap 21,1-4) : « Je vis un ciel nouveau et une terre nouvelle, car le premier ciel et la première terre s’en étaient allés et, de mer, il n’y en avait plus. Et je vis la Cité sainte, la Jérusalem nouvelle, qui descendait du ciel, d’auprès de Dieu, parée pour les noces, comme la fiancée parée pour son Époux. Et j’entendis une voix forte qui venait du Trône ; elle disait : "Voici la demeure de Dieu parmi les hommes, il demeurera avec eux, et ils seront ses peuples, et lui-même, Dieu avec eux, sera leur Dieu. Il essuiera toute larme de leurs yeux, et la mort ne sera plus, et il n’y aura plus ni deuil, ni cri, ni douleur : l’ancien monde s’en est allé". »

À la fin, toute l’humanité sauvée sera rassemblée dans le Corps du Christ qui est « plénitude » (1Co 12, 27), parce qu’il n’y a qu’un seul chemin vers Dieu, c’est le Christ et il n’y a qu’une place pour nous auprès du Père, c’est dans l’Église, comme membre du Christ, comme fils adopté dans le Fils éternel.

L’Église est cependant une entité à la fois visible & invisible : elle n’est pas limitée aux frontières de ce que l’on voit et ce que l’on voit, ce n’est souvent pas l’Église, mais son reniement, de l’extérieur ou de l’intérieur.

Cela dit, l’Église est et restera indispensable pour la relation à Dieu et pour le salut.

Retrouver l’amour de l’Église est donc aussi indispensable, parce que le seul chemin vers Dieu passe concrètement par le Christ et par l’intégration à son Corps qui est l’Église.

L’Église est donc bien véritablement le « sacrement universel du salut, le signe et l’instrument de l’union intime avec Dieu »[4] et on serait bien avisé de la reconsidérer, de l’aimer, de la défendre et de la rejoindre.


[1] Eph 5,32 ; Ap 22,17

[2] Procès de Jeanne d’Arc, 6e interrogatoire privé, 17 mars 1431.

[3] Expression de saint Cyprien de Carthage (IIIe siècle) citée dans le Catéchisme de l’Église catholique, nn. 846-848.

[4] Concile Vatican II, Lumen Gentium n°1